L'Adda et les "navigli" en Lombardie
 
   


Le réseau VEV se devait de rendre hommage à l'Italie, berceau de la Renaissance européenne, où les ingénieurs étaient passés, dès le 15e siècle, maîtres dans la construction des canaux.

C'est notamment à l'Italie que nous devons l'introduction des portes d'écluse doubles, busquées, universellement adoptées aujourd'hui.

Le "Naviglio" de Martesana construit entre 1462 et 1470 sous la direction de Bertola da Novate (1410-1475) en est l'exemple. Utilisant l'eau de l'Adda à Trezzo, il suit le cours de cette rivière sur huit kilomètres avant de se diriger vers l'ouest, traversant la plaine de Lombardie jusqu'à Milan et parcourant une distance totale de 38 km. Il comporte à l'origine deux écluses et un pont-canal maçonné avec trois travées de 18 mètres, enjambant la Molgora. Ce pont-canal est le premier à avoir été construit exclusivement pour la navigation. Des ruisseaux de moindre importance sont acheminés sous le canal par des siphons d'une conception adoptée plus tard par les ingénieurs du Canal du Midi.

Léonard de Vinci a contribué à faire évoluer les techniques de l'écluse à sas. Il a aussi conçu un premier projet de canal latéral à Paderno, pour contourner les rapides de l'Adda et réaliser le rêve milanais d'une voie navigable ininterrompue entre le Lac de Côme et Milan. L'idée mûrit grâce aux travaux de l'architecte et peintre Giuseppe Meda, auteur en 1574 d'un projet remarquablement ambitieux sur ce site difficile, avec une écluse de près de 18m de chute. La construction du Canal de Paderno est finalement approuvé par le roi d'Espagne en 1590, mais les travaux n'avancent que péniblement, dans un contexte politique et financier confus.

A la mort de Meda en août 1599, toute ambition d'achèvement des travaux est abandonnée. Le premier tronçon mis en eau en 1603 est définitivement asséché en 1617. Les villes de Côme et de Bergâme entretiennent une farouche opposition à cette liaison navigable, qui menace leurs positions commerciales respectives. Il fallait un nouveau "grand dessein" pour que le projet redevienne d'actualité. C'est le cas sous l'administration autrichienne (1748-1796). Les études sont reprises par le représentant de l'Autriche en Lombardie, le comte Firmian, et confiées aux ingénieurs/mathématiciens Pecis, Lecchi, De Regis et Frisi. L'entrepreneur Nosetti est retenu pour les travaux en 1773. Le projet reprend les fondations de l'écluse commencée par Meda, mais sur des bases plus modestes. On comprend en effet que Nosetti ait préféré répartir la chute de 30 mètres en six écluses au lieu de deux. Le canal est ouvert à la navigation le 11 octobre 1777 en présence du comte Firmian et de l'Archiduc d'Autriche. Cependant, le canal n'est définitivement praticable que deux ans plus tard, suite à l'effondrement partiel d'une des écluses.

Pendant que la navigation commerciale périclitait au cours du 19e siècle, d'autres utilisations voyaient le jour ou se renforçaient, notamment l'irrigation, et vers la fin du siècle le paysage de la vallée de l'Adda a été profondément remanié par l'arrivée de la "houille blanche".